Au fur et a mesure que je redécouvre et que je vous partage ce qui a fait notre vie sur le plateau ardéchois dans les années 60-80 …vous pourriez penser que pour ces paysans, l’attachement à leurs terres, à leur mode de vie était inconditionnel … ou plutôt inéluctable …que finalement, la vie était belle, avec cette coloration rustique, authentique et naturelle …
En fait, pour mes parents qui sont nés et qui on grandi sur ce plateau ardéchois rugueux et austère, il y avait toujours le rêve de vivre ailleurs…si bien qu’ils ont passé leur vie avec l’intention de partir … partir pour une ferme dans un région au climat plus clément ou partir pour quitter ce monde paysan ou le travail n’avait pas de fin pour un monde ou le travail avait des limites (c’était alors le monde ouvrier)
Quelques voyages au-delà de ces terres, la venue des premiers touristes, la visite des cousins de la ville qui étaient ouvriers ou fonctionnaires nous faisaient miroiter une vie ailleurs plus facile , plus riante, plus colorée …et ce n’était pas une illusion car la vie était vraiment plus facile ailleurs …Le point le plus noir de cette vie de paysan sur le plateau ardéchois était le climat qui rendait le quotidien difficile surtout en hiver et qui ne permettait pas une productivité agricole suffisante pour avoir un niveau de vie en phase avec, ne serait ce que la classe ouvrière de l’époque …
D’ailleurs, l’état et l’Europe ayant pris conscience de ces problèmes, développèrent une politique dite « politique de la montagne » dont la finalité était de permettre aux populations locales de vivre mieux au pays. Cela s’est concrétisé notamment par une agriculture subventionnée pour compenser les handicaps naturels. Pour justifier de telles aides, on expliquait aux paysans qu’ils n’étaient pas seulement des paysans mais des jardiniers d’un espace naturel à la disposition de tous ... Et en quelque sorte, ils recevaient une rémunération complémentaire pour cela… Cependant, allez expliquer à un paysan qui travaille avec sa femme plus de 12 h par jour, sans vacances, sans weekends, que son travail à lui-seul ne suffit pas à faire vivre sa famille … que finalement, avec le temps, sans ces aides, son exploitation n’est plus viable …
Pour mes parents la peur de l’inconnu, la crainte de ne pas s’en sortir financièrement ont eu raison de leurs rêves. Je dois avouer qu’en tant qu’enfants, ils nous avaient communiqué cette crainte si bien que je n’imaginais pas leur vie ailleurs …je me souviens encore avec quel soulagement j’apprenais qu’ils renonçaient à tel ou tel projet pour continuer leur vie à la ferme.
Cependant, nous les enfants nous étions la nouvelle génération et il était clair dans la tête de mes parents que notre vie ne serait pas à la ferme. Mon père avait bien intégré que l’école était la voie par excellence pour une vie meilleure et il n’eut pas de mal pour nous en convaincre.
Aucune politique agricole d’aide des zones défavorisées, aucun paysage si beau soit-il n’ont pu enrayer la désertification inexorable du plateau ardéchois …
Il n’est pas d' évocation plus "romantique" de cet exode rural, que cette magnifique chanson de jean Ferrat ...cependant, je ne suis pas sure qu'au fond de son cœur, un paysan ait pu écrire de telles paroles ...On reconnait bien l'urbain qui a adopté une terre sans en adopter ses travers (avec tout le respect que je porte à Monsieur Ferrat ). Mais est ce qu'on demande a une chanson de nous dire toute la vérité, n'existe-t-elle pas aussi pour nous faire rêver !
LA MONTAGNE
« Ils quittent un à un le pays
Pour s’en aller gagner leur vie
Loin de la terre où ils sont nés
Depuis longtemps ils en rêvaient
De la ville et de ses secrets
Du formica et du ciné
Les vieux ça n’était pas original
Quand ils s’essuyaient machinal
D’un revers de manche les lèvres
Mais ils savaient tous à propos
Tuer la caille ou le perdreau
Et manger la tomme de chèvre
Pourtant que la montagne est belle
Comment peut-on s’imaginer
En voyant un vol d’hirondelles
Que l’automne vient d’arriver?
….
Deux chèvres et puis quelques moutons
Une année bonne et l’autre non
Et sans vacances et sans sorties
Les filles veulent aller au bal
Il n’y a rien de plus normal
Que de vouloir vivre sa vie
Leur vie ils seront flics ou fonctionnaires
De quoi attendre sans s’en faire
Que l’heure de la retraite sonne
Il faut savoir ce que l’on aime
Et rentrer dans son H.L.M.
Manger du poulet aux hormones »
Nb : Évolution démographique de la population du Béage
La commune du Béage s'étend sur 32,8 km² et compte 318 habitants depuis le dernier recensement de la population datant de 2006, ce qui fait une densité de 9,7 habitants par km².
1847
|
1863
|
1883
|
1891
|
1916
|
1929
|
1962
|
1968
|
1971
|
1975
|
1982
|
1990
|
1999
|
2006
|
1731
|
1743
|
1602
|
1512
|
1400
|
1302
|
609
|
640
|
651
|
531
|
436
|
352
|
337
|
318
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RépondreSupprimerJa fiz varias tentativas de escrever aqui e não consegui, vamos ver se hoje eu consigo.
RépondreSupprimerParabens pela postagem completa. Bem escrita e cuidada! Essa narrativa foi tocante, a musica eu amo, como ela é bela e melancolica!
A vida na montanha é dura, simples, basica. Sempre fico admirada com a força e dignidade de seus pais, que souberam fortalecer o carater de seus filhos e ajudar a fazer boas escolhas. A eles minha gratidão e profundo respeito.
bisous
bonjour
RépondreSupprimerJ ai vecu mon enfance dans une ferme au Béage, comme toi..je reconnais parfaitement nos conditions de vie dans tes récits...
Moi je suis quand même resté agriculteur sur cette commune et j y suis très heureux.
Cependant je reconnais que votre vision de la vie, de l avenir a vous tous ceux qui ont déserté la Montagne est plus réaliste que celle de ceux qui n ont pas abdiqué.
J en veux pour preuve et je vous l annonce ici , l arrivée d un désert humain dans la montagne ardéchoise , il reste encore une trentaine d années et nos villages seront vidés , nos ferme abandonnés nos commerces seront ouvert juillet aout et seulement sur l axe routier le gerbier , le lac....
En effets , si nous n avons pas opté, comme vous , pour une vie plus facile ailleurs, nos enfants eux le font a l' unanimités.J en veux pour preuve qu aucun jeune de moins de vingt ans , fille ou garçons , n envisage sérieusement de faire sa vie au Béage.
Aussi cela vous donne raison , il est quasiment impossible d avoir une vie de famille et professionelle épanouie ici, on le reconnait a notre tour, ils nous a juste fallut un peu plus de temps.
Je tiens aussi a te félicité pour ton écriture et a te dire que j ai trés bien connu tes parents, et beaucoup de gens de leur génération du Béage et je tiens ici a leur rendre hommage.Quand on voit qu'a Barbe aucun "acampadis "a pu seulement y rester en vacance,( ils ont tous revendu la maison après quelques années) et que tes parents y ont élevés trois enfants..... Moi je dis respect aux gens du cru!!!!!et des exemples comme çà j en ai a la pelle.....
cordialement...
ton témoignage me touche ( j'y sens de la tristesse et de la fatalité ...mais c'est normal ) et ton constat ne m'étonne pas du tout ...cela rejoint ce que je dis sur le Beage
Supprimer"Exister pour lui, c’est sûr, c’est un combat de tous les jours …" mais pour combien de temps encore ??
le seul retournement de situation possible serait si "les terres faciles " ne suffisaient plus a nourrir la planète..alors on serait obligés de re_exploiter de telles terres ...
je voudrais juste rectifier que notre depart du pays n'était pas un abdication, un renoncement (non pas dans notre cas )
notre départ était guidé par l'attrait du Nouveau ,du Facile ...on dit que l'herbe est toujours plus verte ailleurs ..et pour nous , c'était vrai ... par contre, pour certains cela pouvait être une abdication car ils ne voyaient pas comment ils pouvaient continuer a vivre au pays ..alors ils partaient ...un peu contraints
je voulais écrire un post d'hommage aux anciens et ta conclusion me le rappelle ( je vais y réfléchir )
c'est vrai iles étaient courageux ... et ce courage nous fera peut-être défaut pour les années qui viennent
bonne continuation au béage
bonsoir
RépondreSupprimerJe penses que les chansons de Marc Michel parlent bien de ce plateau qui nous manque, Elles collent parfaitement a tous les chapitres de ton blog.... (je sais pas si tu les connais?)
J'y suis retourné il y a pas très longtemps, j ai apprit qu il restait 5 ou 6 personnes a Lachamps RAPHAEL . Pas beaucoup plus a USCLADES. LE CROS ,Issarlés sont beaucoup touché aussi, et je suis pas sur que çà tienne encore trente ans.... J ai lu dans la presse que le plateau a perdu plus de 80% de sa population en 100 ans... çà vaut tous les commentaires je pense.... Bon courage sur ta ferme.....
j'ai découvert par hasard ce chanteur en faisant ce blog ...je suis allée re-ecouter ses chansons et effectivement , j'aurais pu les utiliser pour illustrer certains chapitres ..je ne sais pas pourquoi , je ne mes ai pas retenu ..peutêtre que j'ai un faible pour jean ferrat
RépondreSupprimernotre a été vendu et re-vendu je ne sais combien de fois ...il ne nous reste que les souvenirs ..
j'aurai aimer avoir plus de photos pour illustrer cette époque