jeudi 1 janvier 2015

Beauté sauvage

Ardèche vieille terre, vieilles pierres, vieux murs
Souvenirs de ma jeunesse qu' êtes vous devenus ?

Vous dormez dans les "levades", "les drailles",
"les chazaou" les "narces" les "ginestes" ...
sur le suc du Toupernas, sur le suc du montfol, 
dans la burle, dans le froid, dans le brouilard ...







lundi 23 décembre 2013

Le Noël de notre enfance


Se remémorer le Noël de notre enfance n’est pas forcement un exercice facile … mais je me souviens que la magie était au rendez-vous. L’esprit universel de Noël  soufflait aussi dans les fermes du  plateau ardéchois. 
  
Noel , c’était d’abord le père Noël, puis plus tard la messe de Minuit.  
Et oui le père Noël   connaissait aussi le plateau ardéchois à cette époque… On n’avait pas de cheminée mais un fourneau et à l’angle de ce fourneau, on mettait une planche de bois ou le soir du 24, on déposait une chaussure. Comme partout ailleurs, la nui du 24 au 25, le père Noël nous livrait un cadeau.  On était très impatient de se lever pour découvrir  notre cadeau, LE CADEAU , certainement l’unique cadeau de l’année alors c’est dire la valeur qu’il avait ..Cela pouvait être une poupée, une dînette  un jeu de chevaux, un jeu de mille bornes… en grandissant, le cadeau devenait utile : un dictionnaire Larousse pour après disparaître une fois que nous étions  devenus «  trop grands ». Avec le cadeau, dans la chaussure on avait quelques papillotes, une orange …. Je me souviens surtout que les meilleures papillotes  étaient les papillotes Revillon … les connaisseurs ne me contrediront pas.

Avec l’école, on  découvrait qu’il y  avait  d’autres traditions attachées à Noël, spécialement la crèche et le sapin. Aussi, en grandissant, nous voulions que Noël ressemble aux Noel de nos livres … Pour un Noël, j’avais  demandé une crèche comme cadeau. Avec la crèche, on percevait le côté « spirituel » de l'évènement, sans en comprendre véritablement la portée. Je me souviens que, dans le noir, une simple bougie allumée, j' essayais  de  "méditer"   sur le mystérieux  sens de noël… je pense que la seule idée que je percevais de cet évènement, c’était Jésus venant sur terre pour faire du bien.  


la foret était bien derrière la maison 
Quand au sapin, quand nous avons décidé un jour de l’introduire dans nos traditions, nous allions en foret couper un sapin… la foret était derrière la maison. C’était  si simple, nous ignorions  que c’était tout de même interdit car la foret ne nous appartenait pas …Enfin, je ne sais qui aurait pu nous verbaliser en hiver sur le plateau ardéchois !

Pour  ce qui  est du repas, je n’ai aucun souvenir particulier  …  pas  de ripaille …peut être notre seul luxe était le gâteau de Savoie (sorte de génoise)  que ma mère faisait de temps en temps pour des  évènements exceptionnels.

Il y eut une époque où  le groupes de jeunes du village donnait un spectacle pour Noël avant la messe de minuit  Nous préparions en automne des chants, des  pièces de théâtre en fonction du talent de chacun .  Ce spectacle était  payant … et l’argent du spectacle nous servait à  faire un voyage en été … c’est ces spectacles qui ont financé nos premiers voyages à  l’ETRANGER  (voyage que nous faisions en car et ou nous campions) … l’Italie , l’Espagne …si franchir une frontière aujourd’hui peut être si banal … à  l’époque, c’était  un vrai évènement … comme si entre  deux frontières, tout changeait …quelle ne fut pas ma surprise de constater la banale  continuité du  paysage entre deux  pays… 

On se dit parfois que l’ignorance rend la vie plus belle , plus savoureuse , plus magique …. La connaissance en démystifiant les choses, en les mettant a notre portée leur enlève … cet esprit de Noel (c’était ma minute philosophique connectée à Noël !) 

samedi 14 avril 2012

Que reste-il de notre enfance ?



Ma sœur et mon frère
Plonger dans ses souvenirs d’enfance, c’est comme soudain se mettre à lire  un vieux livre  connu, découvert au  fond du grenier. Parfois les mots sont effacés, parfois les  pages sont déchirées, mais certains paragraphes sont presque aussi clairs que s’ils sortaient de l’imprimerie. Pourquoi ces paragraphes-là sont restés? Quel tri mystérieux peut bien s’opérer  au fil de ces années ? L'encre n’était pas de qualité égale ? Qui a bien pu arracher telle page ?

Ce livre car ancien, soudain nous passionne. Pourtant, on croyait l’avoir plutôt oublié. Il nous parle de nous, il éclairerait même soudain notre présent. Non, définitivement, il ne nous laisse pas indifférent. D’un seul coup, on le chérit. On a peur de perdre les pages encore intactes faites de luminosités et d’atmosphères indescriptibles, de détails incongrus, d’objets inoubliables , de sentiments  tenaces  ou  flous , légers ou douloureux … il est un  détail troublant, il semblerait qu’en le relisant, on aurait tendance à transformer un peu son contenu.

Avec notre regard d’adulte, qui  de plus  connait le monde contemporain, on prend soudain conscience que les années 60-70 de notre  enfance paysanne  ne furent pas banales. Ce furent   des années charnières dans le monde rural qui bascula soudain dans la modernité : route, électricité, voiture, machines-outils, éducation, … Le  monde paysan qui nous avait bercé  s’en allait, un monde paysan fait de labeur, d’abnégation, d’économie mais aussi de convivialité avec ses fêtes, ses foires, ses veillées …

Je suis trop réaliste pour le magnifier et pourtant, je suis aussi trop consciente  de la richesse qu’il a donné à ma vie … Est ce que j’envierai l’enfance urbaine actuelle de mes enfants, de mes neveux ? … Je suis obligée de reconnaitre qu’elle manque de saveur,  quelle manque de l’effort qui fait  que ce qui est  obtenu par l’effort a du prix. 

Nous étions 3 enfants
De cette enfance qui s’est passé avec  en quelque sorte, les deux pieds dans le monde paysan mais avec la tête chaque fois plus imprégnée du monde citadin et moderne, nous avons  gardé je crois au fond de nous-mêmes, cette  capacité de s’émerveiller, de se  laisser surprendre encore par la vie  et d’en apprécier sa variété. Nous avons hérité de cette nécessité d’aller à l’essentiel.  De manière surprenante aussi, un  manque d’aisance, une certaine gaucherie, un sentiment d’infériorité, d’inadéquation par rapport  aux gens de la ville  nous colle toujours un peu à la peau. Même  si le temps nous a permis peu à peu de superer   tout cela, il y a toujours un peu du « paysan » en nous, dans nos gestes, dans notre mode de pensée.

Plonger dans ses souvenirs d’enfance, ce n’est pas seulement entretenir   une certaine nostalgie du passé, c’est aussi, étrangement, tisser un lien entre les générations futures   qui ne doivent pas oublier leurs  origines (c’était  en partie  ce qui a motivé ma démarche  dans ce blog)

mercredi 21 mars 2012

Septembre 1987 ....On tourne une page

L'heure de la retraite avait sonné pour mes parents ...Ils allaient avoir 60 ans ...Mon père et ses sœurs propriétaires de la ferme que nous exploitions se résolurent à la vendre à un jeune agriculteur  du village
C'est un moment clé de l'histoire de notre famille :Notre ferme était vendue ...le seul morceau de terrain qui  nous reste  sur ce plateau , c'est une concession au cimetière du Béage !
L'observation peut paraitre légèrement cynique, je vous l'accorde ... On comprends bien que la  terre est quelque chose de cher à une âme de paysan  ...vendre ses terres, c'est mourir un peu je pense ...
Cette fois-ci , mes parents ne pourraient plus reculer ... Ils déménagèrent dans un petit village de Haute-Loire : Pradelles
Notre héritage paysan en quelque sorte n'allait plus qu'être fait que de souvenirs !



Signature de l'acte de vente par mon père 








Repas avec le notaire, le futur propriétaire et la famille pour "marquer" l'évènement


Combien de fois la ferme a -t-elle été vendue depuis ? je ne sais pas mais je sais qu'elle a connu plusieurs propriétaires ! Un jour, quelle ne fut pas ma surprise de découvrir dans une une agence immobilière du Monastier (43) l'annonce suivante ... c'était notre ferme ....Vous noterez son atout principal : une vue extraordinaire !




 
 


on est en juin 2014 et que trouve-t-on sur le web ! une fois de plus notre ferme a vendre
... le décor intérieur  a  beaucoup changé



 
 





mardi 13 mars 2012

Mais ou sont les fermes d'antan?

A quelques exceptions près , les fermes du plateau ardechois avaient 2 destins possibles :
- Soit elles terminaient en ruines après le départ de leur propriétaire ...les terres étaient rachetées pour agrandir une exploitation existante
- Soit elles étaient adoptées par un citadin qui en faisait  sa résidence secondaire (les terres étaient également vendues) ...Alors, elles connaissaient une nouvelle vie ...mais parfois l'adoption étaient de courte durée ...car quand le coup de foudre était  passé ...il fallait un amour plus profond pour  continuer à  vivre avec  ces vieilles bâtisses

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TROUILLARD   La ferme ou est né mon grand-père,  à  Tousières  .... le toit de chaume "battait  de l'aile" ....aujourd'hui il doit rester quelques pierres et des herbes folles en été










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LES ESTIALADES La ferme de notre voisin Clovis ...Après son départ de la terre des vivants ....sa ferme, petit a petit, est devenue une ruine




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BRAILLE... au creux de la vallée ...abandonnée ...

Le Moulin de Braille
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GAMET .... je ne sais plus ce que ce fut son destin

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BIGORRE  ...chaume, lauze , éternit  ....un toit en patchwork


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BOURRE la ferme de nos voisins Baptistou et Yvonne ....cette ferme a connu plusieurs amoureux ....ce qui lui a permis de rester debout 


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L'OUSTANOU  ....cette ferme aussi a connu un renaissance grâce a un couple  de salon de Provence qui en a fait sa résidence secondaire


















nb ces photos ont  plus de 20 ans .... il serait  intéressant de refaire les  mêmes photos aujourd'hui 

vendredi 24 février 2012

Ils quittent un a un le pays ...


Au fur et a mesure que je  redécouvre et que je vous partage  ce qui a fait notre vie sur le plateau ardéchois dans les années 60-80 …vous pourriez  penser que pour ces paysans, l’attachement à  leurs terres, à leur mode de vie était inconditionnel … ou plutôt inéluctable …que finalement, la vie était belle, avec cette coloration rustique, authentique et naturelle …


En fait, pour mes parents qui sont nés et qui on grandi sur ce plateau ardéchois rugueux  et austère, il y avait toujours le rêve de vivre ailleurs…si bien qu’ils ont passé leur vie  avec l’intention de partir … partir pour une ferme dans un région au climat plus clément ou  partir pour quitter ce monde paysan ou le travail n’avait pas de fin pour un monde ou le travail avait des limites (c’était alors le monde ouvrier)


Quelques voyages  au-delà de ces terres, la venue des premiers touristes, la visite des cousins de la ville qui étaient ouvriers ou fonctionnaires nous faisaient miroiter une vie ailleurs plus facile , plus riante, plus colorée …et ce n’était pas une illusion car la vie était vraiment plus facile ailleurs …Le point le plus noir de cette vie de paysan sur le plateau ardéchois était le climat qui rendait le quotidien difficile surtout en hiver et qui ne permettait pas une productivité agricole suffisante pour avoir un niveau de vie en phase avec, ne serait ce que la classe ouvrière de l’époque … 


D’ailleurs, l’état et l’Europe  ayant pris conscience de ces problèmes, développèrent  une politique dite « politique de la montagne »  dont la  finalité était de permettre aux populations locales de vivre mieux au pays.  Cela s’est concrétisé notamment par une agriculture subventionnée   pour compenser les handicaps naturels. Pour justifier de telles aides, on expliquait aux paysans qu’ils n’étaient pas seulement des paysans mais  des jardiniers d’un espace naturel à la disposition de tous ... Et en quelque sorte, ils recevaient une rémunération complémentaire pour cela… Cependant, allez expliquer à un paysan qui travaille avec sa femme plus de 12 h par jour, sans vacances, sans weekends,  que son travail  à lui-seul ne suffit pas à faire vivre sa famille … que finalement, avec le temps, sans ces aides, son exploitation n’est plus viable …


Pour mes parents  la peur de l’inconnu,  la crainte de ne pas s’en sortir financièrement ont eu raison de leurs rêves. Je dois avouer qu’en tant qu’enfants, ils nous avaient communiqué cette crainte si bien que je n’imaginais pas leur vie ailleurs …je me souviens encore avec quel soulagement j’apprenais qu’ils renonçaient à tel ou tel projet pour continuer leur vie à la ferme.
Cependant, nous les enfants nous étions la nouvelle génération et il était clair dans la tête de mes parents que notre vie ne serait pas à la ferme. Mon père avait bien intégré que l’école était la voie  par excellence pour une vie meilleure et il n’eut pas de mal pour nous en convaincre.
Aucune politique agricole d’aide des zones défavorisées, aucun paysage si beau soit-il n’ont pu enrayer la désertification inexorable du plateau ardéchois  …

Il n’est pas d' évocation plus "romantique" de cet exode rural, que cette magnifique chanson de jean Ferrat ...cependant, je ne suis pas sure qu'au fond de son cœur, un paysan ait pu écrire de telles paroles ...On reconnait bien l'urbain qui a adopté une terre sans en adopter ses travers  (avec tout le respect que je porte à  Monsieur Ferrat ). Mais est ce qu'on demande a une chanson de nous dire toute la vérité, n'existe-t-elle pas aussi pour nous faire  rêver !


                         LA MONTAGNE
                  « Ils quittent un à un le pays
                  Pour s’en aller gagner leur vie
                  Loin de la terre où ils sont nés
                  Depuis longtemps ils en rêvaient
                  De la ville et de ses secrets
                  Du formica et du ciné
                  Les vieux ça n’était pas original
                  Quand ils s’essuyaient machinal
                  D’un revers de manche les lèvres
                 Mais ils savaient tous à propos
                 Tuer la caille ou le perdreau
                 Et manger la tomme de chèvre
 
                 Pourtant que la montagne est belle
                 Comment peut-on s’imaginer
                 En voyant un vol d’hirondelles
                 Que l’automne vient d’arriver?
                               ….
                Deux chèvres et puis quelques moutons
                Une année bonne et l’autre non
                Et sans vacances et sans sorties
                Les filles veulent aller au bal
                Il n’y a rien de plus normal
                Que de vouloir vivre sa vie
                Leur vie ils seront flics ou fonctionnaires
                De quoi attendre sans s’en faire
                Que l’heure de la retraite sonne
                Il faut savoir ce que l’on aime
                Et rentrer dans son H.L.M.
                Manger du poulet aux hormones »






Nb : Évolution démographique de la population du Béage 
 La commune du Béage s'étend sur 32,8 km² et compte 318 habitants depuis le dernier recensement de la population datant de 2006, ce qui fait une densité de 9,7 habitants par km².

1847
1863
1883
1891
1916
1929
1962
1968
1971
1975
1982
1990
1999
2006
1731
1743
1602
1512
1400
1302
609
640
651
531
436
352
337
318